30 avril 2010
It's real, and sometimes it fuckin' hurts
Mais pourquoi fallait-il que les femmes compliquent toujours tout ? Oui elle était partie. En définitive c’est ce qu’elles font toutes. Un jour ou l’autre. Partir. Seule la manière diffère. Il y a celle qui a tué dans l’œuf et se barre avec les jolies coquilles. Celle qui vous met une chanson comme ça, pour se donner un coté mélomane. Il y a celle qui part sans prévenir, vous laissant seul un matin avec vos yeux pour pleurer et une paire de Stilletos vernis taille 36 dont vous ne savez pas quoi faire. Et il y a les autres. Il se fit l’amère réflexion qu’au fond, elles faisaient toutes partie des autres. Et comme toutes les autres il était déjà entrain de l’oublier. Enfin, sa tête commençait sérieusement à déconner. Il la voyait sortir de la cuisine en s’essuyant les mains. Elle s’était adossée contre le montant de la porte et l’avait longuement regardé. Là où le bat blessait actuellement c’est que son visage était flou, variable. Il lui prêtait les fossettes d’une autre, des yeux verts qui n’étaient pas les siens. Oui, il commençait sérieusement à déconner. Même sa main qu’il portait sous son nez en devenait fumeuse, aérienne. Putain, c’est donc ça qu’on ressent quand ça arrive. Il ne l’avait vraiment pas vu venir cette fois. Comme on ne remarque pas les infiltrations dans la tapisserie avant que celle ci ne soit complètement pourrie, recroquevillée sur elle-même à vomir ce qui jadis étaient des fleurs. D’ailleurs il venait officiellement d’oublier comment il l’avait connue. Ça ne devait de toutes façons pas être très original. Probablement une rue pas trop passante, dans un café, entourés d’inconnus. Elle avait une silhouette fine. Peut-être. Elle n’était plus là et ça, il le ressentait bien. Ce jour là elle avait su qu’il avait un préservatif dans la poche gauche de son jean. Elle lui avait montré ses cuisses mal dissimulées par une jupe. Bien qu’en vérité il ne soit plus vraiment sur que ce soit-elle qui ce jour là avait sous-entendu qu’eux deux, pour une journée, une heure, une vie ça pouvait marcher. Mais oui, ça n’avait plus d’importance, et ça, il l’avait déjà dit. Elle venait de partir. Ils avaient eut une conversation à propos du cinéma anglais avant. Et elle avait allumé une cigarette. Non. Non. Ça ne collait pas. Elle ne pouvait pas s’être allumée une cigarette puisqu’elle détestait son haleine qui trop souvent exhalait le tabac. Il s’en alluma une d’ailleurs, la cramant en souvenir de celle qui n’aimait pas ça. C’était ironiquement plaisant et la première bouffée lui extirpa un crachat furieux. Merde. Il commençait vraiment à ressentir le manque en fait. Le calendrier était bloqué au dimanche et elle s’était barrée en laissant une valise pleine de certitudes. Elle ne reviendrait pas, non. Oh non, elles ne reviennent jamais. Et ça vaut mieux. Ça leur évite de vous voir bourré comme un coing et seul. Seul et pestant contre les femmes. Toutes les femmes.
Il n’était pas vraiment d’humeur à se plaindre cependant. Tout juste était-il d’humeur à lui reprocher le choix de la couleur du salon. Parce que oui, ils l’avaient peint ensemble ce salon. C’était quelque chose pour lui. Quelque chose qui lui faisait croire que ça allait durer toute la vie. Il était naïf. En fait ça ne dure jamais que jusqu’au moment ou elles se lassent de la couleur des murs. Plus les choses empiraient et plus il devenait lucide. Quelle acuité magnifique ! Elle était au moins du niveau de celle qui l’empêchait de se cogner contre les murs au matin. Elle-même supérieur à celle qui lui faisait éviter les coins fourbes des meubles. Il se serait bien cogné la tête contre un mur pour évacuer le vertige qui commençait à s’imposer à lui, celui qui faisait tourner les sus-nommés meubles et donnait l’impression que leurs angles n’étaient pas droits. Allait-elle s’endormir toute seule, habillée dans ses draps froids ? L’avait-elle déjà remplacé ? Oui, il pensait à elle. C’est vrai. Il avait beau essayer de faire semblant, elle finissait toujours par revenir. Comme un mauvais refrain, comme une mauvaise herbe. Comme une vieille habitude. Il se trouva romantique, même si dans la pratique c’était la merde noire, la croix et la bannière. Il se souvenait. Un peu. Il était resté silencieux et elle avait balancé un torchon dans sa direction. Elle cachait quelque chose en dessous. Elle avait ensuite glissé deux doigts sous son menton. Comme pour l’embrasser. Elle s’était plongée dans ses yeux. Et lui aussi d’ailleurs. Dans les siens à elle, bien sûr. Ils n’avaient pas parlé. C’était inutile. Les dialogues c’est toujours bien dans les films, pour faire pleurer dans les chaumières. Et très honnêtement il n’avait pas envie de pleurer, il avait déjà suffisamment mal comme ça. Laissons la médiocrité aux autres. Aux faibles. Ceux qui aiment. Ceux qui détestent. Elle était douée pour les deux en fait. Pour aimer, pour haïr. A se faire aimer, à se faire honnir. Il fallait lui reconnaître ce talent. Sa capacité à jouer sur tous les tableaux. C’était une femme admirable. Et comme toutes les femmes admirables qui s’en vont, elle ne laissait que de l’incompréhension. Il ne comprenait pas. Ne comprenait pas pourquoi après lui avoir cassé les couilles, après lui avoir brisé le cœur, il avait fallu qu’elle piétine les morceaux en lui collant une balle dans le ventre.
Non, définitivement, il ne comprenait pas.